POLEMIQUE Le professeur angevin
Jean-Marc Mouillie, co-auteur de « Médecine, santé et sciences humaines », est
accusé d’enseigner le chamanisme et l’ésotérisme à ses étudiants, dans le
numéro 789 de Sciences et avenir. De quoi faire bondir la doyenne de la faculté
de médecine, Isabelle Richard.
55h de sciences humaines en première
année de médecine, 24h en deuxième et en troisième année : la faculté d’Angers
suit scrupuleusement les règles établies par le ministère de l’Enseignement
supérieur avant la réforme des études de médecine, en 2009, jamais reprécisées
depuis, explique Isabelle Richard, doyenne de la faculté de médecine d’Angers.
Elle l’assure : « Avec un coefficient de 20% en première année, 6% en
deuxième et troisième année, il n’y a pas d’originalité angevine ».
Sur le contenu, pas de mystère non plus :
sociologie, linguistique, épistémologie, histoire et droit médical en première
année, approche de la bioéthique en deuxième année, éthique médicale et
inégalités sociales de santé en troisième année. « Le programme est disponible sur internet, comme
les cours qui sont tous filmés » souligne-t-elle. Le message est clair :
pas question de se laisser démonter par l’enquête de Sciences et avenir, qui
accuse l’université d’Angers d’ésotérisme, voire de sectarisme, dans son
dernier numéro paru le 20 octobre.
Le professeur mis en cause, Jean-Marc
Mouillie, rappelle que le manuel mis en cause
« Médecine, santé et sciences
humaines », édité sous la responsabilité du Collège national des enseignants en
sciences humaines et sociales en médecine, fait référence. « La question du
chamanisme y est bien abordée, admet-il... En trois ou quatre pages sur
plus de 300, comme d’autres médecines traditionnelles. Cela permet aux
étudiants de comprendre que la médecine n’a pas toujours été scientifique, et
donc de mieux appréhender les attentes des patients ».
L’objectif est « d’inciter les
étudiants à développer leur esprit critique, leur capacité de questionnement...
souligne Jean-Marc Mouillie. Je pourrais d’ailleurs inviter M. Hertel (l'auteur
de l'article de Sciences et avenir, NDLR) à suivre cet enseignement ! Car
réduire la médecine à l’application d’un savoir scientifique pose question. A
Angers, nous avons l’ambition de former des médecins compétents, pratiquant un
savoir scientifique, mais également conscients des responsabilités qui leur
incombent ».
Depuis la parution de l’article, les
principaux intéressés défendent d’ailleurs bec et ongles cet enseignement : la
CoMA (corporation de médecine d’Angers) a cosigné un courrier de la direction
destiné aux étudiants, exprimant « très fermement (son) soutien à
l’enseignement dispensé en sciences humaines », et la Fé2A (fédération
étudiante des associations angevines) a envoyé un courrier de soutien.
Selon la doyenne de la faculté, le « papier
» est tout simplement « malveillant », avec un
« amalgame de
plusieurs choses » : en effet, Sciences et avenir établit un lien entre des
pratiques médicales liées à des sectes (qui n’ont rien à voir avec Angers) et
une affaire de harcèlement moral, associée une dérive sectaire (survenue dans
un laboratoire de l’Inserm à Angers). « Et entre ces deux éléments, pour
faire le lien je dirais, on retrouve la critique de l’enseignement en sciences
humaines à la faculté de médecine d’Angers » conclut Isabelle Rochard.
La doyenne de faculté de médecine n’a été
contactée « ni avant, ni après » la parution de l’article, contrairement
à Jean-Marc Mouillie qui avait reçu avant l’été un mail d’Olivier Hertel,
l’auteur de l’enquête dans Sciences et avenir. « Pris dans les impératifs et
les examens de fin d’année, je l’ai complètement oublié... Croyez bien que je
m’en repends aujourd’hui ! »
L’université d’Angers a déjà demandé un
droit de réponse aux différents médias qui se sont fait l’écho de cette « campagne
» qui « nous fait un tort considérable » estime Isabelle Richard. « Nous
avons envoyé un courrier à nos deux ministres de tutelle, ministre de
l’Enseignement supérieur et ministre de la Santé, pour demander une inspection
conjointe ». Cependant l’université n’envisage pas de porter plainte.
Source : La Tribune d’Angers, 31 octobre 2012
http://www.tribune-angers.fr/news/accusation-d-esoterisme-la-fac-de-medecine-s-explique
jean-marc mouillié