Un
maître de l’illusion bluffe les chefs d’entreprise. Cet ancien de Science Po
donne des conférences spectacles. Aussi bien pour HEC que pour les clubs
d’entreprises.
Prendre garde aux apparences, ne pas
croire tout ce que l’on voit, ou se méfier de ses propres certitudes. Des
évidences parfois bonnes à rappeler. Sébastien Clergue fait mieux que cela. Il
les met en scène pour mieux les démonter.
L’homme a ainsi tour à tour "bluffé",
"surpris" voire "inquiété" certains spectateurs,
jeudi soir dans l’auditorium de Plaisance à Barbezieux.
Les 200 personnes présentes, toutes
responsables ou cadres d’entreprise du club "Entreprendre en
Sud-Charente" ou de "Défi Haute-Saintonge", le club voisin de
Jonzac, ou encore du "Club des jeunes dirigeants", ne sont a priori
pas des gens qui se laissent griser.
Surtout devant une sorte de maître de la
magie. Sauf que Sébastien Clergue n’a pas les tours dans son sac, mais dans sa
tête. L’ancien de Sciences Po, qui a travaillé quelques années à l’ONU et a
choisi de s’adonner à sa passion, ne voulait plus se contenter de faire des
tours de cartes dans les restos ou les cabarets. "Avec Matthieu
Sinclair, on a eu envie de théoriser notre pratique et montrer la magie de la
relation. L’illusionnisme est une fenêtre d’apprentissage sur nos propres
perceptions. Nous proposons en fait un détour par l’illusion pour aller vers le
réel". En quelque sorte, ouvrir la montre pour comprendre le mécanisme
et démontrer que la psychologie est un ressort essentiel pour la maîtrise de
l’illusion, ou de la manipulation. "Il nous a rappelé des choses que
l’on nous répète, mais là on le voit concrètement. C’est assez étonnant", remarque
Jean-Manuel Géral, le patron de la distillerie d’Angeac-Champagne.
Exemple, jeudi: Sébastien Clergue soumet
au public une addition simplissime, tellement évidente pour chacun que tout le
monde a répondu... faux. Et lui de démontrer comme on peut se faire piéger par
manque d’attention. Lui découvre le bon chiffre caché par un spectateur, en lui
demandant de toujours répondre non, donc de mentir.
Coach de David Copperfield
"Attention, ce que je fais n’a
rien à voir avec le mentalisme. Il faut savoir observer", explique-t-il. "D’ailleurs je peux me tromper
ou ne pas être sûr, alors j’ai un plan B, C ou D, jusqu’à me mettre le
spectateur dans la poche".
Et d’en tirer d’éventuelles leçons de vie
ou de management. "On apprend parfois beaucoup plus sur un candidat en
le raccompagnant à la porte de l’entreprise que par un entretien classique, dit-il,
mais attention, on ne donne pas de leçons". Mais Sébastien Clergue
révèle que notre attention en moyenne se relâche au bout de neuf minutes, pour
reprendre très vite. Et qu’il faut se méfier des raccourcis inconscients.
Il intervient régulièrement dans les
grands groupes, participe à des cursus de formation et a été sollicité à
l’École des hautes études commerciales de Paris (HEC) "parce que l’on
propose quelque chose de décalé et une manière différente de faire passer un
message". En revanche, il refuse le coaching personnalisé, sauf pour
David Copperfield, la star de la magie américaine, qui fait régulièrement appel
à lui pour travailler sur de nouveaux tours de magie.
Dans la salle, le public applaudit et se
surprend à se faire piéger. "On peut certainement le transmettre dans
la relation que l’on a en entreprise, pourquoi pas?", avance Yann
Bordier, de la tonnellerie Mercier.
Mais il reste sans doute beaucoup à
faire. "Regardez, nous avons 200 personnes mais toutes se retrouvent
entre connaissances. Pas facile de bousculer nos habitudes", conclut
Thierry Chauvin.
par Pascal HUORD
Source : La Charente Libre, 7 décembre 2013,
http://www.charentelibre.fr/2013/12/07/l-illusionniste-demonte-les-certitudes-a-barbezieux,1869219.php