« Disons que nous en sommes à un stade
émergent », explique Laurence Bibas, l’une des premières Françaises à vouloir
faire profiter les travailleurs des atouts de la « pleine conscience ».
L’expression désigne le fait de diriger
son attention délibérément sur le moment présent, avec bienveillance. C’est ce
que les Anglo-Saxons appellent mindfulness.
Membre de l’Association pour le
développement de la mindfulness (ADM), Laurence Bibas a effectué sa première
mission en entreprise il y a deux ans seulement.
« Depuis, la Lyonnaise des eaux, Danone,
GDF Suez ont fait appel à moi pour former les encadrants et leurs équipes. Soit
pour une journée de séminaire, soit pour des sessions de trois heures par
semaine durant un mois et demi. Je leur apprends à méditer sans ressasser le
passé, sans anticiper le futur, ce qui permet de réduire le stress. Aux
Etats-Unis, cela fait des décennies que la méditation est pratiquée, des
prisons aux hôpitaux, de l’école au bureau. En France, nous en sommes aux
balbutiements, mais on perçoit une vraie curiosité. »
D’autant plus forte que travail en temps
de crise rime souvent avec dépression, voire suicide.
Un marché porteur mais critiqué
« Démunis, les responsables de ressources
humaines font trop souvent appel à la méditation comme un “truc” antistress
efficace en quelques heures, déplore l’écrivain Fabrice Midal, fondateur de
l’école occidentale de méditation. Or méditer exige régularité et constance.
Mais cela vaut le coup. »
Créateur de la collection Esprit
d’ouverture, chez Belfond, Midal constate l’engouement pour les livres sur la
méditation. Ainsi les 300 000 exemplaires vendus de Méditer jour après jour, de
Christophe André, en 2011, les 15 000 exemplaires d’Apprendre à méditer, qu’il
a lui-même publié en 2013, et les 10 000 exemplaires du tout nouveau Méditer au
travail, de Michael Chaskalson.
« Le Connectez-vous à vous-même que
Chade-Meng Tan a mis au point pour Google, par exemple, est une formidable
promesse d’une vie professionnelle plus harmonieuse », se persuade-t-il.
Sociologue du travail, Danièle Linhart
est bien plus sceptique : « Je crains que cette proposition soit
instrumentalisée dans le seul but d’accentuer la rentabilité des employés. Il y
a une forme de cynisme à proposer de masser, déstresser, etc., les salariés,
histoire qu’ils aillent mieux... à défaut de réparer ce qui les fait souffrir.
Cela ressemble à une médecine de guerre. Ne vaut-il pas mieux la paix ? »
Même sentiment chez Marie Pezé,
psychologue, qui a créé la première consultation sur la souffrance au travail :
« Cela ressemble à un gadget de plus, comme les caissons de récupération, les
siestes... Au lieu de s’attaquer aux problèmes de flux tendus, de pression
toujours plus forte ou, déjà, de commencer à ne pas placer des réunions le soir
! »
Alors ? Aplanir son flot d’émotions pour
– seulement – être plus « efficace » au travail ?
« On ne pourra pas éviter que n’importe
qui s’engouffre dans la mode de la méditation et fasse n’importe quoi, nuance
Laurence Bibas. Mais si on le fait sérieusement, méditer, c’est au contraire
devenir moins instrumentalisé. Parce qu’on apprend à redevenir bienveillant
avec soi-même. » Beaucoup visiblement en attendent ce résultat.
Source : Le Parisien Magazine, 17 avril 2014
Note du
CIPPAD : il convient de
rappeler que la méditation de Pleine Conscience ou Mindfulness n’est qu’une adaptation de la méditation Vipassana de
S.N. Goenka. Il s’agit d’une forme de méditation par le vide, basée sur
l’écoute de sa respiration. L’association américaine International Cultic Studies Assocation rapporte des témoignages
troublants concernant la méditation Vipassana.